Comme vous pourrez le voir dans les différents articles et dossiers qu’abrite cet espace en ligne, la transmission-reprise de toute entreprise est une véritable aventure, parfois semée d’embûches pour les plus novices. Mais heureusement, d’une part, la CCI et la CMA de votre région œuvrent chaque jour pour que cette aventure soit pour vous un pari gagnant. Et d’autre part, nous avons bien l’intention de continuer à vous accompagner ! Aujourd’hui, nous allons nous pencher sur un modèle prisé par bon nombre de porteurs de projets : l’économie sociale et solidaire.

Longtemps considérée comme alternative, l’économie sociale et solidaire tend à être reconnue comme un modèle profondément ancré dans le territoire français. En 2022, on dénombrait plus de 155 000 entreprises dans le secteur (tous statuts juridiques confondus), employant plus de 2,6 millions de personnes (soit 10 % du nombre d’emplois en France, dont 14 % des emplois du secteur privé). Si ces chiffres ne vous éblouissent pas particulièrement, sachez qu’ils font l’objet d’un travail de fond prometteur, mené de concert par l’État et les Régions depuis le début de l’année 2024, à travers le dialogue amorcé entre la ministre déléguée aux entreprises Olivia Grégoire et le groupe de travail Régions de France créé en 2023. Mais en attendant que le modèle coopératif soit pleinement valorisé à l’échelle nationale, nous vous proposons d’en revoir les bases, afin de bien préparer votre projet.

L’économie sociale et solidaire : une définition subtile

Faites le test : demandez autour de vous ce qu’est une entreprise sociale et solidaire. Il y a de fortes chances que les définitions que l’on vous donne soient au pire, inexactes, au mieux, incomplètes. Et cela peut se comprendre, puisque l’étiquette « sociale et solidaire » désigne tout à la fois : un mode de fonctionnement et un type de secteurs d’activité. À l’origine, une entreprise sociale et solidaire doit répondre à des conditions précises de fonctionnement, quel que soit son secteur d’activité. Ces conditions sont :

  1. Une gouvernance démocratique incluant aussi bien les salariés et parties prenantes que les associés, dont la voix ne pèse plus seulement via leur apport en capital ou le montant de leur participation.
  2. Des bénéfices à l’opposé du profit individuel, puisqu’ils doivent être en partie réinvestis dans l’entreprise afin d’en assurer le maintien et le développement, mais aussi être répartis de manière équitable entre les salariés et les dirigeants, dont les rémunérations comparées n’affichent pas de grands écarts.
  3. Le but premier de l’entreprise n’est pas la lucrativité, mais la solidarité et l’utilité sociale, dans un objectif d’intérêt général. C’est pourquoi parmi les entités de l’économie sociale et solidaire, on trouve des secteurs aussi variés que l’éducation, la citoyenneté, le soutien aux personnes fragiles, la cohésion territoriale, la promotion culturelle ou encore le développement durable.

Une fois ces conditions remplies, reste le choix du modèle d’organisation. Outre les associations, les fondations et les mutuelles qui n’ont pas le statut d’entreprise à proprement parler, on trouve les coopératives et les entreprises dites « sociales ». D’un côté, les premières assurent à leurs salariés et leurs usagers la détention de parts égales, tant pour partager les profits que pour prendre les décisions, sur le principe de « une personne vaut une voix ». C’est par exemple le cas de la célèbre enseigne Biocoop, ou de la banque française Crédit Coopératif. De l’autre côté, les entreprises sociales suivent avant tout les grands principes de l’économie sociale et solidaire cités plus haut. Ainsi, elles pourront, par exemple, embaucher des personnes éloignées de l’emploi, limiter les écarts de salaire ou encore agir en faveur de l’environnement sans appartenir à un secteur social et solidaire profondément marqué. C’est le cas de l’entreprise Yuka, à l’origine de l’application mobile du même nom, qui permet de scanner les emballages de produits alimentaires afin d’évaluer leur impact sur la santé.

En somme, une entreprise de l’économie sociale et solidaire ne doit pas tant répondre à un cahier des charges drastique qu’au trio de conditions citées plus haut. De plus, il n’est pas tant question d’un secteur d’activité que d’un mode de fonctionnement. D’où la confusion généralement observée autour de la question.

La transmission-reprise, un véritable fer de lance

Pour comprendre les grands principes d’une entreprise de l’économie sociale et solidaire tels qu’ils sont formulés aujourd’hui, il faut revenir dix ans en arrière. Plus précisément au 31 juillet 2014, date où la loi sur l’ESS, initiée par le ministre délégué Benoît Hamon, a été promulguée. S’adressant à toutes les entreprises de moins de 250 salariés, cette loi avait pour objectif de lutter contre la disparition d’entreprises considérées comme saines et porteuses d’avenir, faute de repreneurs. Ainsi, son texte impose au dirigeant d’une entreprise d’informer ses salariés de son projet de cession au plus tard deux mois avant la date estimée de cette dernière, afin qu’ils soient en mesure de présenter, s’ils le souhaitent, une offre d’achat.

Longtemps, cette obligation a été considérée comme une sorte de droit de préemption des salariés. Pourtant, il s’agit seulement d’un droit d’accès à la reprise, qui vise d’une part à valoriser la connaissance profonde que les salariés ont de « la maison », et d’autre part à pérenniser leurs emplois menacés par les circonstances. S’il passe outre cette obligation d’information, le cédant se voit exposé à une sanction radicale : l’annulation de la cession par n’importe lequel des salariés dans les deux mois qui suivent. Quant aux moyens d’informer ses collaborateurs, ils sont variés. Cela peut aussi bien se faire lors d’une réunion avec émargement que via un affichage (avec signature d’un registre), l’intervention d’un huissier, ou un courrier (électronique avec certification de la réception, recommandé avec A/R, ou simple contre remise en main propre).

Quel que soit le mode d’information choisi, chaque salarié peut présenter son offre d’achat, sachant que le cédant n’est contraint ni de l’accepter, ni d’entrer en négociation. Ni même d’informer ces aspirants repreneurs des négociations qu’il mène par ailleurs. Autre détail important : ces derniers ne sont pas tenus à une obligation de confidentialité, mais seulement de discrétion. C’est-à-dire qu’aucune sanction particulière n’est prévue par la loi en cas de manquement. Le cédant pourra néanmoins, le cas échéant, demander réparation devant la juridiction civile, ou appliquer une sanction disciplinaire. Autrement dit, en tant que cédant, la qualité de vos relations avec vos salariés s’avérera un atout majeur dans votre projet de transmission !

Une concrétisation accessible

Dans l’optique de reprendre l’entreprise qui vous emploie, vous pouvez en tant que salarié demander assistance auprès de votre CCI ou de votre CMA, en lien avec les CRESS (Chambres Régionales de l’Économie Sociale et Solidaire). Côté financement, si, pendant longtemps, les entreprises sociales et solidaires ont dû compter sur des subventions de l’État, les moyens sont aujourd’hui plus diversifiés. On citera par exemple le crowdfunding (financement collaboratif), et un enthousiasme général autour de l’épargne solidaire, via le développement de fonds d’investissement à impact positif. En revanche, sachez que votre dossier de financement ne bénéficiera pas d’un traitement de faveur. En effet, il sera analysé de la même manière que pour une entreprise classique.

Cela étant dit, l’obtention de subventions et de crédits à taux zéro pour la reprise d’entreprise agiront comme un gage de confiance et vous aideront, par effet de levier, à obtenir des financements supplémentaires. Parmi les principaux organismes de financement, on peut compter La Nef (coopérative de finances solidaires), la Caisse d’Épargne ou encore l’Adie (idéale pour les porteurs de projet n’ayant pas accès au système bancaire traditionnel). Votre conseiller CCI / CMA pourra enrichir cette liste d’établissements dédiés et vous accompagner au mieux. N’hésitez pas à le contacter !

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